Nous avons vu dans la 1ère partie de cet article, les éventuelles erreurs à éviter ou à s’interdire en temps de crises afin de minimiser au maximum les dégâts de ces moments inconfortables dans nos vies. S’il y a des erreurs à éviter, il y a également des pistes à explorer. Chaque couple est différent car chaque être est différent et il se peut que ce qui marche pour certains ne marche pas pour d’autres. C’est ainsi que nous apprenons avec le temps à voir ce qui peut être utile de mettre en place dans notre couple comme ce qui n’est pas utile pour « nous ». Toutefois, il y a des pistes communes à tous qui peuvent peut-être devenir le début d’une solution, s’il plaît à Dieu…
Revenir à Dieu et s’en remettre à lui
Pas de meilleur remède que celui d’apprendre à se tourner dans les bons et mauvais moments, petits et grands bobos vers Celui qui a les remèdes! Invoquer ensemble ou séparément, revoir notre relation à Dieu et s’en remettre à Lui est sûrement la solution pour que les choses s’arrangent ! D’ailleurs, nous verrons déjà en notre for intérieur un réel apaisement si nous nous dirigeons vers Dieu dans la prière et l’invocation, en effet Dieu ne dit-Il pas « Ceux qui ont cru et dont les coeurs se tranquillisent à l’évocation d’Allah ». N’est-ce point par l’évocation d’Allah que se tranquillisent les coeurs ? » (1)
Revenir à Dieu en serviteur humble et impuissant, placer nos affaires entre Ses « mains » et Lui faire confiance pour apaiser les choses aideront les choses à s’apaiser. Il est Celui qui peut lorsque nous ne pouvons rien, il est Celui qui est capable lorsque nous sommes impuissants. Il nous faudra apprendre durant les crises à revenir vers Dieu et Lui confier notre sort en ayant confiance qu’Il sait ce qu’il y a de mieux pour nous et qu’Il nous apportera les solutions de là où Il le veut.
Dialogue et intelligence émotionnelle
Il y a crises car il y a malaise, frustrations, sentiment d’être incompris ou rejeté. Il y a souvent crises car un besoin n’est pas assouvi ou parce qu’il y a une chose extérieure ou intérieure à soi qui vient obscurcir le ciel de nos deux amoureux. Parfois nous n’arrivons pas à exprimer des choses qui pourraient nous gêner ou nous affecter, laisser s’accumuler est une erreur car viendra le jour où une goutte fera déborder le vase et la colère peut alors être grande! Pour rester calme dans les moments de crises, il me semble important de ne pas laisser les choses s’envenimer et d’apprendre à dialoguer calmement et sereinement avant l’orage. Pour cela, il est important d’apprendre à communiquer. La communication est un art! Nous devrions tous nous attarder sur ce sujet-là qui est la base de toute relation humaine. Il existe aujourd’hui un grand nombre d’ouvrages, de formations, séminaires sur le sujet. Apprendre à communiquer sereinement c’est donner une chance à son couple de dépasser les moments difficiles. Lorsque deux êtres entrent en relation (et ici la relation la plus étroite et intime qu’il puisse exister entre une femme et un homme), il y a un grand nombre d’émotions et de ressentis qui viendront éclairer ou ternir la relation, c’est ainsi que le dialogue étant important, il est primordial également de cultiver son intelligence émotionnelle.
Le terme d’intelligence émotionnelle (IE) a été proposé et défini en 1990 par les psychologues Salovey et Mayer. Ils définissent l’intelligence émotionnelle comme « une forme d’intelligence qui suppose la capacité à contrôler ses sentiments et émotions et ceux des autres, à faire la distinction entre eux et à utiliser cette information pour orienter ses pensées et ses gestes». Ces auteurs ont par la suite révisé leur définition de l’intelligence émotionnelle. Selon leur nouvelle définition, qui est aussi la plus généralement acceptée, l’intelligence émotionnelle désigne « l’habileté à percevoir et à exprimer les émotions, à les intégrer pour faciliter la pensée, à comprendre et à raisonner avec les émotions, ainsi qu’à réguler les émotions chez soi et chez les autres » (Mayer & Salovey, 1997). (2)
Selon Daniel Goleman ( psychologue américain né le 7 mars 1946 à Stockton (Californie) dans son ouvrage « intelligence émotionnelle 1995 explique que Rien ne sert d’avoir un cerveau brillant et un quotient intellectuel élevé si nous ne comprenons rien à l’empathie, si nous ne savons pas lire nos émotions et celles des autres et si nous sommes étrangers à notre propre cœur ou apatrides à cette conscience sociale qui nous apprend à nous connecter, à gérer la peur, à être assertif-ve-s… L’intelligence émotionnelle est, que nous le voulions ou non, l’authentique clé pour être heureux-se. Goleman explique que l’on trouve quatre dimensions basiques qui structurent son point de vue sur l’intelligence émotionnelle :
– La première est l’auto-conscience : elle fait référence à la capacité que nous avons à comprendre ce que nous ressentons et à être en permanence connecté-e-s à nos valeurs, à notre essence.
– Le deuxième aspect est l’auto-motivation et notre faculté à nous orienter vers nos objectifs, à rattraper les contre-temps et à gérer le stress.
– Le troisième est lié à notre conscience sociale et à notre empathie.
– Le quatrième échelon est sans aucun doute la pierre philosophale de l’intelligence émotionnelle : il s’agit de notre capacité à nous lier, à communiquer, à parvenir à des accords et à nous connecter aux autres de façon positive et respectueuse.
Le quatrième point ainsi que la définition de Mayer et Salovey nous intéressent particulièrement dans cet article, en effet lors de moments complexes de la vie de couple, apprendre à reconnaître ses émotions, savoir et comprendre ce que l’on ressent et pourquoi mais surtout savoir contrôler ses émotions peut réellement aider à garder un self-contrôle et à ne pas faire ou dire des choses que l’on pourrait regretter. L’intelligence émotionnelle nous aidera non seulement à gérer nos propres émotions mais également à comprendre les émotions de l’autre.
Trouver des méthodes pour dissiper la colère
Il y a en notre bien-aimé Prophète ( Paix et Salut de Dieu sur Lui) un fin psychologue. Les compagnons aimaient le questionner sur les différents sujets de la vie quotidienne dans le but de parfaire leurs caractères et de devenir meilleurs.
Nombreux sont les Hadiths et récits qui évoquent la question de la colère et les solutions pour s’en défaire :
D’après Soulayman ibn Surad, il se trouvait une fois aux côtés du Prophète (bénédiction et salut sur lui) quand deux hommes se mirent à échanger des injures. L’un des adversaires eut le visage tout rouge et les artères du coup tendues. Le Prophète, paix et salut sur lui, dit : « Je connais une formule qui calmerait cet homme: s’il disait : « Je demande la protection divine contre Satan le damné » il serait débarrassé de ce qu’il éprouve » (3)
Il nous conseille aussi à travers ces paroles : « Si un homme en colère dit : je demande protection à Dieu, sa colère s’apaise » (4). Ou encore : « Quand l’un de vous se trouve en colère, qu’il se taise » (5)
Petites attentions et belle opinion
Désamorcer une dispute, un conflit ou une crise peut se faire avec quelques gestes simples et efficaces. Continuer de jouer son rôle au sein de la famille même si l’on est en froid, peut aider à rétablir les choses. Acheter un petit présent, dire de belles paroles, être aux petits soins, avoir de petites attentions qui ne coûtent rien financièrement mais qui toucheront l’autre… sont autant de moyens de désamorcer une crise et de permettre qu’elles ne prennent pas plus d’ampleur.
Quoique l’on en pense, l’être humain est touché par les attentions que nous pouvons lui porter, sachons faire abstraction des rancunes et rancœurs et témoignons à l’autre de petites attentions quotidiennes parce que si elles nous touchent en temps de paix, leur impact est encore plus grand en temps de «guerre»! Il nous faut apprendre à écraser nos egos, penser positif et avoir une bonne opinion de l’autre.
Il n’y a rien de plus néfaste en effet que de laisser nos pensées négatives nous envahir dans un moment de faiblesse et rien de plus empoisonnant que de laisser germer en nous les mauvaises opinions sur l’autre…. Pensons durant les moments de crises à penser positif, ne penser que du bien de l’autre et lui trouver des excuses! Les choses s’enveniment dans nos esprits comme nous le disions ci-dessus parce que nous les laissons prendre de la gravité et de l’ampleur, il nous faudra apprendre à changer notre façon de voir les choses, l’autre et ce que nous pensons de lui.
Dialoguer avec les enfants
La meilleure façon de protéger ses enfants comme nous le disions ci-dessus est d’expliquer aux enfants qu’en ce moment nous sommes un peu fâchés mais que les choses vont s’arranger et qu’il n’y a rien de grave. Leur expliquer qu’il est normal que parfois papa et maman ne s’entendent pas mais que cela n’enlève en rien au fait qu’ils s’aiment et qu’ils les aiment et que tout finira par s’arranger. Évitons les disputes devant les enfants mais ne soyons pas dupes, ils ressentent les choses et savent lorsque tensions il y a… alors dialoguons avec eux de ce qu’ils peuvent comprendre et entendre.
Toutefois, leur demander leurs avis sur la question du litige ou tout expliquer n’est pas bon, ayons la sagesse de leur dire juste ce qu’il faut selon leur âge et leurs sensibilités. Ne faisons pas des moments difficiles de la vie de couple, un ring à ciel ouvert où chacun des deux conjoints ne pense plus qu’à lui et en oublie que les enfants peuvent être très marqués par les disputes de leurs parents. Préservons-les contre nous-même et épargnons-leur des scènes qui peuvent les bouleverser.
Respecter l’état de l’autre
Marie Bareaud, sexologue, nous explique dans l’une de ses vidéos que : « souvent, dans la vie, on fait 1 + 1 = 1 en pensant que c’est l’équation du couple heureux. Alors que la bonne formule est 1 + 1 = 3 ».
Un couple est composé de deux individus, devenir et former un couple ne fait pas de nous » un » mais plutôt trois. Cela peut paraître tellement logique mais pourtant les couples ont parfois des difficultés à dépasser des crises car ils n’ont pas conscience que le couple heureux n’est pas le couple fusionnel mais plutôt celui qui apprendra qu’il y a deux individus et ensuite le couple. En effet, il y a le conjoint, la conjointe et le couple qu’ils forment c’est ainsi qu’il est important de se rappeler que l’être qui partage notre vie n’est pas nous, cet être a ses propres besoins, attentes, espoirs, craintes, projets personnels… Évidemment l’on partage beaucoup de choses mais nous sommes différents et il faut garder une certaine indépendance pour son propre bien-être. C’est ainsi que durant une crise, il faudra apprendre à respecter l’état de l’autre, ce qu’il/elle ressent et ce dont il/elle a besoin pour faire passer ce moment difficile.
Chacune des deux parties gérera à sa façon les moments de tensions et de discordes du couple qu’ils forment. Chacun des deux conjoints essayera avec les outils qui sont les siens, son vécu, son expérience, son intelligence émotionnelle, sa foi, ses qualités et ses défauts … de gérer au mieux ces étapes importantes qui peuvent renforcer le couple si les efforts sont déployés. Dans tous les cas peu importe comment chacun essayera de sortir la tête de l’eau, le respect de l’état de l’autre (quand bien même il nous est totalement impossible de le comprendre, que l’on trouve la réaction disproportionnée ou exagérée…) est une chose à apprendre! Il/elle n’est pas nous et par conséquent il/elle ne réagit pas comme nous et ne ressent pas les mêmes choses que nous. C’est aussi parce que nous sommes 1+1 = 3 qu’il est important d’exprimer à l’autre ce que nous ressentons sans jugement ni reproche parce que l’autre ne peut le deviner et il est également important d’accueillir le ressenti de l’autre sans se braquer ni se fermer.
Respecter l’état de l’autre et apprendre à exprimer ce que l’on ressent peut aider à traverser bien des complications et des turbulences, cela peut prendre beaucoup de temps mais cela s’apprend, il faut juste en avoir conscience et faire en sorte de « changer » soi-même pour que les choses changent.
Prendre du temps et du recul
Il y a certains moments où l’on a l’impression qu’une situation est grave, le poids que l’on porte nous semble lourd, les choses nous paraissent compliquées… Si cela peut être le cas pour certaines crises, la plupart du temps les querelles de couples prennent de graves proportions parce que dans nos esprits nous les avons rendues ainsi! Combien de fois lorsque l’on a laissé passer du temps nous nous sommes rendus compte à quel point finalement nous avions rendu les problèmes plus graves qu’ils ne l’étaient! Prendre du recul et du temps c’est permettre d’y voir plus clair et permettre à la colère de retomber! Dire ou faire des choses sur un moment d’énervement peut vraiment nous porter préjudice! La patience vis-à-vis de soi, envers l’autre mais également la patience face aux évènements compliqués dans nos vies est une vertu à cultiver et à s’approprier. Sans la patience, on ne peut prendre du temps et du recul pour que ce qui semble être difficile ne devienne facile. Prenons du recul face aux évènements, apprenons à en tirer des leçons et servons-nous-en pour grandir et mûrir « ensemble ».
S’excuser
Lors d’une crise penser qu’il y a un fautif et une victime est erroné, souvent les torts sont partagés et cela dans la relation conjugale mais également dans toute relation « conflictuelle ». Dans tous les cas, charger l’autre de tous les torts et s’en laver les mains n’est pas la solution. Ainsi, que l’on se sente ou pas responsable, apprendre à s’excuser par des mots est important! Apprenons à dire « excuse-moi, pardonne-moi, je suis désolé, je ne voulais pas te faire du mal… » est une façon de désamorcer les choses et de calmer les tensions. C’est également un bon moyen pour se remettre en question en se questionnant sur ce que nous pouvons changer pour que les choses aillent mieux. Il y a mille et une façon de s’excuser, c’est ainsi que pour certaines personnes, il sera simple de le dire oralement alors que pour d’autres il faudra un vrai travail sur soi pour le dire ou le faire comprendre! Peu importe, disons-le! C’est la stabilité de notre couple qui en dépend.
La demande de pardon peut réellement changer l’état d’un cœur, désamorcer plus d’une crise et apporter le calme après la tempête. Servons-nous des nouvelles technologies pour parler, s’il est difficile de le dire écrivons-le avec des mots, par mail, sms … L’important est que l’autre sache que nous sommes désolés! S’excuser c’est une façon de dire à l autre « je suis prêt à faire la paix, je me remets en question et je fais un pas vers toi parce que je t’aime, tu es important pour moi et notre relation est précieuse ». S’excuser n’est pas une faiblesse, s’excuser et ne pas se laisser aller à la colère est une force que nous devons cultiver en nous. C’est un réel travail sur notre ego qui nous aidera à parfaire notre caractère, écraser son ego et faire cette demande de pardon par n’importe quel moyen nous apporte avant tout à nous avant de faire du bien à l’autre… Alors apprenons à dire pardon et accordons notre pardon!
Créer et retrouver des moments d’intimité
Comme expliqué dans la première partie de notre article, faire chambre à part lors d’une crise conjugale devrait être une chose que nous nous interdisons. Si les deux parties sont fâchées et ne peuvent pour le moment retrouver « leur intimité », il est toutefois important et essentiel de s’endormir l’un près de l’autre. Parmi les solutions et pistes à explorer pour désamorcer une crise, il y aura la fameuse « réconciliation sur l’oreiller ».
Selon Catherine Blanc, sexologue et psychanalyste, « la sexualité est le lieu où peut s’envisager une rencontre des plus intimes. Non pas tant au regard du sexe lui-même, d’habitude caché et là qui se découvre, mais bien plus parce qu’il est question d’intimité des êtres. Les émotions, le lâcher-prise, la révélation de notre ambivalence entre puissance et fragilité, plus encore, l’officialisation de nos désirs et plaisirs : tel est le théâtre de la sexualité, qui offre la possibilité de se sentir au plus près de soi et de l’autre. À ce titre, la relation sexuelle peut, tel un pont, réunir ce qui a été rompu lors d’une dispute. Cette capacité à se retrouver sur l’oreiller témoigne d’une trêve consentie, d’un désir d’aller vers l’autre, de l’accueillir pour créer ensemble à nouveau. Du reste, la dispute peut être l’occasion de réveiller le mode relationnel du couple, contraignant chacun à se repositionner, à affirmer ses valeurs et ses limites ».
Toutefois, le dialogue doit être présent avant ou après ces retrouvailles des corps car à long terme se servir de ce moyen de réconciliation pour calmer les tensions risque simplement de laisser les choses s’accumuler et camoufler les malaises et mal-être. Les relations intimes comme moyen de réconciliation doivent également être consenties des deux conjoints et ne jamais être imposées et subies. Le dialogue, la compréhension de l’état de l’autre et de ses envies doivent être pris en compte pour que la réconciliation apporte réellement apaisement et sérénité.
Il existe certainement d’autres moyens de calmer les tensions et crises qui, rappelons-le, sont bénéfiques et saines pour faire grandir non seulement chacun des conjoints individuellement mais également faire mûrir le couple qu’ils forment.
Accueillons la crise comme quelque chose de bénéfique et apportons des solutions saines, réfléchies et sages pour dépasser ces moments complexes dans nos vies et en ressortir grandis et plus forts!
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(1) sourate 13 V. 28
(2) Wikipédia
(3) rapporté par Boukhari, Al –Fatah, 61 337
(4) Sahih Djami as Sakhir, 2° 695
(5) Rapporté par l’imam Ahmed dans al Mousnad, 1/339 et cité dans Sahih al – Djami, 639,4027
Source : https://www.psm-enligne.org/